Comment votre intérêt pour les fleurs comestibles, les fruits sauvages et les noix a commencé?
J’ai fait mes études au cégep et à l’université dans le but de devenir professeur, mais ça n’a jamais vraiment fonctionné. Donc, il fallait bien que je me trouve un plan B pour pouvoir vivre, n’est-ce-pas? Alors, je me suis retrouvé avec beaucoup de temps libre, étant donné ma situation. Qu’est-ce que je faisais dans mes temps libre? J’allais en forêt. J’ai commencé à découvrir les fruits sauvages, mais j’ai découvert qu’il n’existait pas de fruits sauvages nordiques. Pour en apprendre davantage, j’ai acheté des livres de références sur ce sujet et c’est à ce moment que je me suis réinventé complètement en culture de botanique, en mycologie et en noix nordiques. Dans un premier temps, j’ai appris tout ce qui est en lien avec les fruits sauvages. Après avoir fait le tour de ceux-ci, mon frère m’a lancé un défi qui était de m’intéresser aux champignons. J’ai accepté le défi et puis j’ai progressé très rapidement. Par la suite, mon frère et moi avons consulté le grand livre répertoire des arbres et des arbustes ornementaux où sont listés tous les arbres et arbustes pouvant être cultivés au Québec. C’est dans cette grosse brique que nous avons trouvé ce que nous allions planter : des noyers cendrés (arbres à noix) qui adorent les terres argileuses. Ça tombait bien puisque chez nous, nous avions ce type de terre. Le noyer cendré est très rare et goûte le beurre. C’était donc un arbre à noix vraiment intéressant à faire découvrir aux visiteurs.
Quel est votre top 5 des meilleures fleurs comestibles au goût?
En première position, la fleur du robinier faux acacia qui se mange telle quelle et qui est très savoureuse. Ensuite, une fleur très aromatique : le pétale de monarde. Elle ne se mange pas en tant que tel. On prend ses pétales (non le bouton floral) et des feuilles pour en faire une boisson. Soit en faisant des infusions trempées dans l’eau froide, soit en cuisant le tout. Nous pouvons également faire sécher les pétales de monardes et les introduire dans plein de recettes. Il y a aussi le pétale de monarde didyma de couleur rouge ou monarde pistuleuse à pétales mauves. Lorsque nous la buvons en boisson chaude, c’est le thé d’ossu ego (l’un des 5 thés patrimoniaux de l’Amérique du Nord). Il y a aussi le pétale de rose du rosier rugueux. Il se mange en tant que tel, mais nous pouvons aussi en faire des sirops, des gelées, nous pouvons en faire ce qu’on veut en fait. Et puis, il n’y a rien qui se compare à l’arôme de la rose. En quatrième position, il y aurait la fleur d’asclépiade. Elle non plus ne peut se manger comme tel, mais elle se transforme merveilleusement bien en sirop et en gelée. Elle a un arôme très prenant et très original. Et pour terminer, la dernière et non la moindre, la fleur d’hémérocalle.
La fleur du robinier faux acacia (Source: https://www.google.ca)
Est-ce qu’il y a des fleurs qui sont vraiment nocives pour la santé?
Oui! Il y en a beaucoup. En tant que professeur des comestibles, je dis aux gens de cueillir ces fleurs et de ne pas en cueillir d’autres. Une fleur qui serait vraiment nocive pour la santé, je dirais sans aucun doute le bouton d’or qui est horriblement poivré. Vous mangez seulement un petit morceau du pétale, et ça brûle la bouche. C’est une belle petite fleur jaune qui semble inoffensive. Il y a également les pétales d’iris. Un pétale dans une portion de salade, ça suffit! Au début, le pétale est très sucré et ensuite, ça deviens âpre. C’est-à-dire, très basique, ça neutralise tout le palais pendant un certain temps. Comme si on avalait une goutte d’eau de javel. C’est donc une drôle de sensation dans la bouche. Mais si vous mettez le pétale d’iris en très petit morceau dans une salade, ça fait un mélange de saveur très intéressant et particulier. Acide, amer, sucré, salé, basique, etc. Comme pour l’ensemble des fleurs comestibles et fruits comestibles nordiques, on se doit de mélanger le tout avec de la salade et autres.
Il existe environ combien de fleurs comestibles au Québec?
Il en existe certainement quelques centaines. Il y a des fleurs qui sont dites comestibles, mais qui ont besoin d’être transformées avant de les manger. Comme la fleur d’asclépiade que l’on transforme en sirop, la fleur de muguet, la fleur de lilas qui sont excellentes une fois transformées. Également, la fleur de marguerite qui se mange, mais qui n’est pas très bonne au goût. Il s’agit de les manger en petites quantités et accompagnées.
Fleur de muguet (Source: https://www.google.ca)
Selon vous, est-ce que nous serions capables de vivre seulement de nourriture qui se trouve dans la nature?
Bien sûr! Et c’est ce qu’on devrait faire. Manger 100% forestier-nordique tout le temps. Nous devrions en produire des millions de tonnes et exporter le tout dans le monde entier et tous être riches de ça. Il y a aussi la viande que nous pourrions élever nous-même afin d’avoir une alimentation diversifiée et équilibrée.
Est-ce que la saison hivernale permet à la nature de faire pousser certains fruits?
Certainement, il y a des fruits à récolter pendant cette saison froide. Les églantines sont particulièrement sucrées en décembre. Les sorbiers du Nord que l’on cueille à la mi-décembre. Nous avons également les pommes sauvages qui sont très bonnes lorsqu’elles sont gelées à plusieurs reprises cueillies à la fin décembre, début janvier.
Pommes sauvages (Source: https://www.google.ca)
Depuis combien d’années environ que vous intéressez-vous à ce monde- là qui est la nature?
Pour ce qui est des fruits sauvages, depuis 1989. Pour les champignons, j’ai clairement commencé en 1999. C’est en 1998 que j’ai reçu mon premier livre sur les champignons. J’ai découvert l’univers des noix en 2006 seulement. Les légumes forestiers c’était en 2009-2010-2011-2012. Je connaissais leur existence, mais je n’avais pas commencé à les cueillir et à les manger auparavant.
Donc, nous pouvons dire que c’est votre métier?
En plus de corriger les épreuves de français du ministère à chaque fin d’année scolaire, je suis formateur en noix nordiques, mycologie et produits forestiers non-ligneux (PFNL) et concepteur de ferme forestière. Je suis en train d’inventer mon propre métier, voyez-vous? Je défends donc, aujourd’hui, la réhabilitation des comestibles sauvages nordiques et leur réintroduction massive dans les paysages naturels, en vue de nourrir des gens. Mon premier but est de faire en sorte que la nature et l’humain se réconcilient.
Que diriez-vous à un jeune, qui aujourd’hui, veut suivre vos traces?
Premièrement, pour ce qui est de l’apprentissage, il faut absolument apprendre tous les comestibles sauvages nordiques sans exception, tous les champignons sauvages, toutes les noix, tous les fruits et les légumes, les racines comestibles, etc. Lorsque la personne sort de la forêt, son panier devrait être bondé de bonnes choses à manger. Pour ce qui est du côté scolaire, c’est une formation PFNL et non un cours. Il existe aussi plusieurs livres où les passionnés peuvent s’y référer pour en apprendre toujours plus. Après avoir acquis les connaissances nécessaires, généralement, les projets commencent. Mais attention, il ne faut pas se lancer trop rapidement dans un projet. Parfois, il n’est pas bien ajuster au milieu naturel où ils veulent les mettre en culture. Généralement, pour débuter, nous commençons par la strate la plus haute, qui est l’arbre à noix. Ensuite, les arbres fruitiers et les arbustes. Avant tout chose, je conseille aux jeunes d’avoir un plan B. Dans ce milieu, c’est des montagnes russes. Nous ne savons pas ce qui se passera demain étant donné que le marché n’est pas encore en place.
Merci à Yvan Perreault d’avoir permis cet article.
Pour le visiter:
Adresse: 511 Kildare, St-Ambroise-de-Kildare, QC JOK 1C0
Tell: 1-450-753-9333
Courriel: info@aujardindesnoix.com
Chantal Dupont, blogueuse solidaire